NELLY MITJA NOUS PROPOSE DE DECOUVRIR LA « P’TITE BIO » DE MARJANE SATRAPI EN 10 DATES CLES

Par Produits BIO

Graphiste, illustratrice, auteure de bandes dessinées, peintre et aujourd’hui réalisatrice, Marjane Satrapi s’est notamment fait connaître à travers son roman graphique autobiographique, Persepolis. L’utilisation du noir et blanc et de l’aplat, juxtaposés au minimalisme de ses graphismes, donnent à son œuvre un effet visuel puissant qui en font la marque de fabrique de la bédéiste.

Aussi, Nelly Mitja nous propose aujourd’hui de découvrir cette auteure de bandes dessinées incontournable en 10 dates clés.

MARJANE SATRAPI EN 10 DATES CLES AVEC NELLY MITJA

  1. 1969 : Naissance de Marjane Satrapi

 Extrait de Persepolis de Marjane Satrapi

Extrait de Persepolis de Marjane SatrapiC’est le 22 novembre 1969 que Marjane Satrapi voit le jour à Rasht, capitale de la province du Guilan située au nord-ouest de l’Iran. Elle grandit à Téhéran au sein d’une famille d’intellectuels progressistes et militants communistes sous le régime du shah jusqu’à sa chute dix ans plus tard, en 1979. Son grand-père maternel était le fils du dernier empereur de la dynastie Qadjar qui a régné en Iran avant les Pahlavi. Ses oncles Anouche et Fereydoune, membres du parti communiste iranien, ont tenté pour leur part de créer en 1946 une république indépendante dans l’Azerbaïdjan iranien. Fille unique et véritable « princesse rouge », elle sera initiée au marxisme à travers la bande dessinée par son père, Ebi Satrapi, ingénieur. La jeune Marjane est également très proche de sa grand-mère, opiomane, féministe, divorcée 3 fois et tatouée du nom de son dernier époux. Cette dernière, qui n’éprouve aucune difficulté à exprimer le fond de sa pensée, prendra grandement part à son éducation et n’aura de cesse de l’influencer et de la guider dans ses choix, même après sa disparition : « reste toujours intègre à toi-même ». A Téhéran Marjane Satrapi fréquente l’École catholique Jeanne d’Arc et évolue dans un climat d’oppression marqué par les raids aériens, les perquisitions et les patrouilles des gardiens de la Révolution islamique de l’ayatollah Khomeini.

 

  1. 1984 : Départ pour l’Europe

Extrait de Persepolis de Marjane Satrapi

Compte tenu de la dégradation du climat politique et sécuritaire en Iran, les parents de la jeune Marjane décident de l’envoyer en Europe en 1984 pour y intégrer le lycée français de Vienne. Agée d’à peine 14 ans, la jeune adolescente se retrouve ainsi seule, livrée à elle-même dans un pays et un contexte qui ne semblent pas correspondre à ses attentes : « Je suis en Autriche. J’étais venue là dans l’idée de quitter l’Iran religieux pour une Europe laïque et ouverte et que Zozo, la meilleure amie de ma mère m’aimerait comme sa propre fille ».

Après un bref passage chez Zozo et sa fille Chirine, Marjane intègre un pensionnat de bonnes sœurs dont elle sera virée. Elle poursuivra ses pérégrinations chez son amie Julie puis dans un « wohngemeinschaft », un genre de colocation, avant d’atterrir dans la villa de Frau Doktor Heller. Si l’adaptation est difficile, Marjane commence à s’ouvrir petit à petit à cet occident idéalisé. C’est l’âge de la transformation mentale… et physique, et celle du premier amour, Markus. Cette période se terminera aussi par une phase d’errance.

 

  1. 1988 : Retour en Iran

Après 4 ans passés à Vienne, Marjane Satrapi retourne en 1988 auprès de ses parents dans un Iran où la guerre et la répression ont fait des ravages.

C’est une nouvelle période d’adaptation. Elle y retrouve Kia, son ami d’enfance, mutilé par la guerre Iran-Irak et se décide à reprendre ses études. Elle rentre à l’université des beaux-arts de Téhéran où elle obtient une maîtrise en communication visuelle.

Elle y rencontre également son premier mari, Reza, vétéran de la guerre. Bien que libéral, Reza est introverti et reste ancré dans les traditions. Leur mariage sera un mariage de convenance qui ne durera pas.

 

  1. 1994 : Retour en Europe

En 1994, Marjane Satrapi retourne en Europe, mais cette fois-ci en France. Après avoir obtenu son diplôme à l’école supérieure des arts décoratifs de Strasbourg, elle s’installe à Paris où elle intègre l’Atelier des Vosges, un espace qui réunit plusieurs auteurs de bandes dessinées. Elle y fera la connaissance d’auteurs comme Lewis Trondheim, Christophe Blain, Joann Sfar ou encore David B., apparentés à ce que l’on nomme aujourd’hui « la nouvelle bande dessinée ».

Et c’est avec les encouragements de David B., alors concentré sur le dessin et l’écriture de son œuvre l’Ascension du Haut Mal, que Marjane Satrapi trouvera le courage de se lancer dans ce qui sera son œuvre majeure, Persepolis. David B. la supportera tout au long de la réalisation du premier tome de l’œuvre dont il signera la préface. Aussi, ce n’est pas un hasard si nous retrouvons chez Marjane Satrapi les mêmes graphismes que chez le co-fondateur de l’Association.

 

  1. 2000 : Parution du premier tome de Persepolis (L’Association)

Premier tome de Persepolis de Marjane Satrapi

Publié par l’Association en quatre volumes de 2000 à 2003, Persepolis retrace l’enfance et le passage à l’âge adulte de la jeune Marjane Satrapi de 1979 à 1993, entre Téhéran et Vienne. En 1979, Marjane, 10 ans, est une petite fille insouciante qui grandit entourée de sa famille à Téhéran. Mais la révolution islamique qui provoque la chute du Shah d’Iran et propulse l’ayatollah Khomeini au pouvoir, va bouleverser sa vie et celle des siens.

Bande dessinée autobiographique, Persepolis nous entraine dans les pérégrinations de la jeune Marjane sur un fond noir et blanc particulièrement tranché. C’est aussi l’occasion de mieux appréhender la révolution iranienne qui est vécue dans ce roman graphique de l’intérieur. En parallèle de l’écriture de Persepolis, Marjane Satrapi travaillera sur différents ouvrages en direction de la jeunesse comme Sagesse et malices de la Perse, Les Monstres n’aiment pas la lune, Ulysse au pays des fous (2001) et Ajdar (2002).

 

  1. 2003 : Parution de Broderies (L’Association)

« Après le déjeuner, les hommes partirent comme d’habitude faire la sieste et nous autres, les femmes, nous nous sommes mises à débarrasser. » Ainsi débute le roman graphique Broderies de Marjane Satrapi. Publiée pour la première fois en 2003 par l’Association, cette bande dessinée au format livre nous entraîne dans l’univers des femmes au cours d’une longue séance de « ventilation du cœur » autour du samovar.

Ici, ce sont trois générations de femmes qui échangent avec humour et légèreté sur le mariage, qu’il soit forcé ou d’amour, la virginité, la sexualité, l’infidélité des hommes et l’usure du couple. A travers cette œuvre, Marjane Satrapi nous offre un véritable moment d’intimité entre femmes qui nous permet de mieux appréhender la société patriarcale iranienne et la condition féminine de l’époque.

Broderies a été nommé dans la catégorie du meilleur album au Festival d’Angoulême 2004 et a reçu le Prix Urhunden du meilleur album étranger traduit en suédois en 2007.

 

 

  1. 2004 : Parution de Poulet aux prunes (L’Association)

Téhéran, novembre 1958. Virtuose de târ et grand amateur du poulet aux prunes (son plat préféré), Nasser Ali Khan perd le goût de jouer après que son instrument ait été brisé par son épouse lors d’une dispute. Ce dernier s’avèrera irremplaçable, et pour cause…

Entre souvenirs et fantasmes, Poulet aux prunes retrace les huit derniers jours de la vie du grand oncle de Marjane Satrapi, qui, désemparé, se laisse dépérir.

Le roman graphique remportera le prix du meilleur album au Festival d’Angoulême 2005.

 

  1. 2007 : Passage à la réalisation et consécration avec Persepolis

En 2007, Marjane Satrapi se lance dans la réalisation avec le long métrage d’animation Persepolis qui fait sa sortie sur le grand écran. Cette adaptation est le fruit d’une collaboration avec Vincent Paronnaud, auteur de bandes dessinées et cinéaste français plus connu sous le nom de Winshluss.

En France, le film est porté par les voix de Chiara Mastroianni (Marjane), Catherine Deneuve (Taji Satrapi), Simon Abkarian (Ebi Satrapi) et Danielle Darrieux (la grand-mère).

Le film sera nominé près de 40 fois et recevra 12 prix dont le Prix Spécial du Jury du festival de Cannes en 2007, le César de la meilleure première œuvre et celui de la meilleure adaptation en 2008.

 

  1. 2011 : Adaptation cinématographique de Poulet aux Prunes

Extrait du film Poulet aux prunes de Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud

En 2011, Marjane Satrapi se rapproche une nouvelle fois de Vincent Paronnaud pour collaborer cette fois-ci sur l’adaptation cinématographique de Poulet aux prunes… avec de vrais acteurs.  Et c’est sous les traits de Mathieu Amalric que nous retrouvons le personnage de Nasser Ali Khan avec dans le rôle de son amour de jeunesse, Irâne, Golshifteh Farahani. La narration est assurée par Edouard Baer, en Azraël, ange de la mort.

Le film a été réalisé en studio afin de garantir le décor des années 50. La même année, Poulet aux prunes est nominé dans plusieurs festivals (Mostra de Venise, Festivals internationaux du Film de Toronto et de Tokyo, London Film Festival…).

De cette expérience, suivront les films La Bande des Jotas (2013), The Voices (2014) et plus récemment Radioactive (2019) qui est l’adaptation du roman graphique Radioactive. Marie & Pierre Curie : A Tale of Love and Fallout de Lauren Redniss.

 

  1. 2020 : Peinture

Annonciation de Marjane Satrapi

En 2020, Marjane Satrapi nous (re)dévoile ses talents de peintre avec l’exposition intitulée Femme ou rien, hébergée par la Galerie Penthièvre.

Elle avait déjà exposé sept ans plus tôt à la galerie Jérôme de Noirmont une série en couleur de 21 toiles mettant en scène les héroïnes qui ont bercé son enfance.

Fruit de sept années de travail, cette nouvelle série de tableaux, au style graphique reconnaissable et aux couleurs vives, met en scène des femmes qui s’affirment.

Pour aller plus loin et retrouver les articles de Nelly Mitja sur l’univers de la BD

 

Auteur : Nelly Mitja

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